[Interview] Hélène Degy : « Il faudrait qu’il y ait d’autres festivals comme Avignon en France »

A l’occasion de la 56ème édition du Festival Off d’Avignon, j’ai pu aller à la rencontre d’Hélène Degy, qui est actuellement à l’affiche de La Grande Musique. La pièce se joue du 7 au 30 juillet au Théâtre Buffon à Avignon.

Bonjour Hélène, tu joues actuellement dans La Grande Musique au Théâtre Buffon. Peux-tu nous présenter la pièce ?

Hélène Degy : La Grande Musique, ça parle de psychogénéalogie transgénérationnelle, sur comment parfois on peut transmettre sans s’en rendre compte des maux de génération en génération et comment on peut les transporter malgré soi. A travers cette transmission, il y a des blocages qui peuvent se créer. Mon personnage perd l’usage de ses jambes assez rapidement dans la pièce et elle va enquêter pour essayer de comprendre pourquoi ça lui arrive parce qu’elle va découvrir que toutes les femmes de sa famille ont subi un traumatisme de ce genre. Donc mon personnage est en quête de ça mais elle découvre aussi que sa mère a refoulé ça et qu’elle ne voulait pas le savoir. C’est une fresque familiale qui s’opère sur le plateau et on est là pour reconstituer la constellation familiale.

Comment es-tu arrivée sur ce projet ? Qu’est-ce qui t’as donné envie de jouer ce double rôle d’Esther et de Frida ?

C’est Salomé Villiers, la metteuse en scène, qui a fait une commande à l’auteur Stéphane Guérin il y a quelques années lorsqu’elle jouait Kamikazes du même auteur, en disant j’aimerais que tu écrives pour tel acteur, tel acteur et tel acteur. A l’origine il y avait Pierre Hélie qui joue mon frère, Etienne Launay qui joue mon amoureux et moi. Après, pour les autres acteurs, il y a eu du changement parce que le temps que le projet se monte, il y a d’autres engagements qui se sont fait ailleurs. Donc, c’est comme ça que ça a commencé. J’ai découvert mes personnages une première fois et ensuite il a fallu creuser, enquêter. C’est une écriture très ciselée et avec beaucoup de sous-couches. L’écriture de Stéphane Guérin est très riche donc la découverte du personnage se fait vraiment dans la découverte de sa langue aussi et, après, dans les relations aux autres. Et tout ça s’est peaufiné au fur et à mesure du travail.

La Grande Musique / © Cédric Vasnier

La pièce parle de psycho généalogie. Est-ce un concept que tu connaissais avant de jouer dans la pièce ?

Avec la pièce, j’ai découvert que c’était quelque chose de très actuel, que c’était quelque chose à laquelle beaucoup de familles se confrontaient aujourd’hui beaucoup plus librement, ouvertement. J’ai aussi découvert que, médicalement parlant, il y avait les pours et les contres : il y en a qui n’y croit pas du tout, il y en a qui y croit mais ça reste quelque chose d’assez actuel.

Après, dans ma propre famille, j’ai un grand-père qui a déjà écrit deux livres sur mes ancêtres, sur la constellation familiale, donc j’ai la chance de connaître beaucoup de choses par le biais de mon grand-père qui a écrit les chroniques de la famille de son point de vue. En plus, je viens d’une famille assez nombreuse donc on est très cousinades. Et, tout ce qui est de l’ordre des ancêtres, de la transmission, c’est quelque chose qui m’intéresse, à laquelle je suis assez sensible. Je pense que je ne connais pas tout, qu’il y a encore beaucoup de secrets de famille dans ma famille mais on est très proches et très liés. Par conséquent, c’était une thématique qui me touchait déjà beaucoup.

La pièce est mise en scène par Salomé Villiers. Comment s’est passé la collaboration avec elle ?

Avec Salomé, ça a été une création très riche, très en propositions. Il y a eu aussi, en amont, un gros travail qui s’est fait avec la scénographie, avec la lumière, avec la composition musicale. En fait, Salomé a été un vrai chef d’orchestre par rapport à tout ça et elle nous a vraiment tous guidé dans un même sens. C’était un grand bonheur et une vraie chance de pouvoir travailler avec elle sur cette thématique-là qui est très forte. Il y a pleins de choses encore à dire dans le travail avec Salomé parce que, sur le plateau, même si c’est une reprise, on découvre encore de nouvelles choses. Je pense que c’est une pièce tellement riche qu’on va pouvoir perpétuer le travail avec Salomé et les autres comédiens qui sont tous fabuleux. C’est une très belle équipe.

La pièce avait déjà été jouée l’an passé. Aborde-t-on le festival différemment par rapport à une création ?

On commence plus détendu car, l’année dernière, on a déjà déposé les choses et, cette année, sur ce socle-là, on ne peut que refaire de la dentelle. On ne l’aborde pas pareil, on est plus détendu même si le public est toujours à conquérir, que rien n’est acquis. C’est très agréable les reprises avignonnaises.

La pièce va-t-elle être reprise à Paris ou en tournée par la suite ?

A Paris, pour le moment, il y a des pistes qui se sont dessinées mais rien d’officiel ni de concret. Je ne peux rien annoncer là-dessus car il faudrait en savoir un peu plus. Et pour la tournée, oui, il y a déjà quelques dates prévues mais grâce au premier Avignon. Et là, avec le deuxième, on espère que ça va faire grandir et grossir la tournée qui se passe toujours un an plus tard donc ce n’est pas pour tout de suite, ça sera pour 2023/2024.

Ce n’est pas la première fois que tu participes au Festival OFF. Qu’est-ce que tu apprécies ici ?

Le festival, c’est la rencontre de tous les théâtres et des amoureux du théâtre. C’est la rencontre de la passion et de pourquoi on fait ce métier. C’est génial parce qu’il y a une proximité avec le public qui, parfois, est sans filtre : il y a un vrai échange. De par la richesse culturelle, tous les différents théâtres qu’il y a, c’est magnifique, il y en a pour tous les goûts. Quand on a repris l’année dernière, je me suis vraiment considérée comme chanceuse parce que ça nous avait vraiment beaucoup manqué et j’ai vraiment senti que le public aussi on leur avait manqué. Cette réunion-là, à Avignon, est unique pour le moment je trouve. Il faudrait qu’il y ait d’autres festivals comme Avignon en France, qu’il n’y ait pas que ce festival parce qu’il y a une espèce de monopole qui existe et ça serait vraiment très chouette que d’autres villes puissent accueillir ce genre de festival de cette ampleur.

As-tu d’autres projets qui se profilent à l’horizon après le Festival ?

Je suis toujours dans une série qui s’appelle Un si grand soleil. Je pense qu’il va y avoir des suites par rapport à ça. J’ai tourné aussi un épisode pour La Stagiaire sur France 3 mais je ne sais pas quand ça sera diffusé, même si j’imagine que ce sera au printemps. Pour La Grande Musique, on attend la suite avec impatience. Et j’ai également un seul en scène que j’ai co-écrit avec Pierre Hélie – avec qui je joue dans La Grande Musique – et qu’il va aussi mettre en scène. Là, on est en train de le monter, on attend de voir où et comment mais ça parle de sexualité, d’éducation sexuelle et c’est sur la quête d’une jeune femme qui est en recherche de son identité, de son plaisir.

Aurais-tu un coup de cœur à partager pour ce Festival OFF 2022 ?

Oui. J’ai eu un coup de cœur pour Mademoiselle Gazole qui se joue à La Luna à 10h. C’est un spectacle tout public, à partir de 7 ans, qui est très beau, très poétique. Ça raconte beaucoup sur l’humanité, sur l’enfance, et sur notre responsabilité en tant qu’adulte. C’est mon interprétation des choses quand on met au monde un enfant, donc c’est un spectacle qui m’a beaucoup touché et que je conseille vivement.

Pour conclure, je te laisse le mot de la fin.

Le théâtre est une joie avant tout qui se doit d’être partagé.

Un grand merci à Hélène Degy d’avoir pris le temps de répondre à mes questions pour Ciné, Séries, Culture.


 La Grande Musique (1h35)

  • Auteur : Stéphane Guérin
  • Metteur en scène : Salomé Villiers
  • Avec : Hélène Degy, Pierre Hélie, Brice Hillairet, Etienne Launay, Bernard Malaka, Florence Muller ou Raphaëline Goupilleau

A l’affiche du Théâtre Buffon du 7 au 30 juillet 2022 à 19h30 (relâches les 10, 17 et 24 juillet)

Résumé : Une histoire de famille qui nous plonge des années 40 à aujourd’hui, au cœur d’un secret enfoui depuis des générations. Lors d’un bal de mariage, le passé refait surface dans les vies de Marcel, Nelly, Georges, Esther, Pierre et Hervé. Entre la France et l’Autriche, ils tentent de réunir, via la psychogénéalogie, les pièces éparses d’un même puzzle : celui d’un secret familial qui dévoile peu à peu son histoire et son enjeu.

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